• Disparition feux tricolores : piétons aveugles en danger ?

    Résumé : La disparition des feux tricolores et donc des systèmes de sonorisation dans certaines zones urbaines inquiète les personnes aveugles qui craignent pour leur sécurité. Une politique de guerre à la voiture au détriment des plus vulnérables ? 

    Par Handicap.fr / Emmanuelle Dal'Secco, le 27-12-2017 

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    Certains citadins rêvent-ils de la suppression des feux tricolores, donnant la priorité aux piétons sur des passages protégés, dans des zones limitées à 30 km/h avec l'objectif de « favoriser la vigilance des conducteurs » ? Une nouvelle façon de vivre la ville à travers la notion « d'espace public partagé ». Ce système est déjà expérimenté en Hollande ou au Danemark avec une diminution du nombre d'accidents, de blessés et de tués, chacun étant obligé, à l'approche d'un carrefour, de faire attention à autrui. Mais s'il est une catégorie d'usagers qui redoute ce changement, c'est bien celle des personnes aveugles ou malvoyantes. Plus de feux cela signifie plus d'alerte sonore. Une récente expérimentation dans le 14ème arrondissement de Paris a mis le « feu » aux poudres car elle se situe précisément dans le quartier Pernety, autour du centre de formation Forja, dédié… aux personnes aveugles !

    Piétons en danger ?

    Fin novembre 2017, Edouard Ferrero, président de la CFPSAA (Confédération française des personnes aveugles ou amblyopes, regroupant la plupart des associations de personnes déficientes visuelles en France), informait la maire de l'arrondissement de son « inquiétude quant à la suppression généralisée » des feux tricolores, notamment en dehors des zones 30. Dans son courrier, il explique qu'elle « remet en cause le principe d'autonomie des personnes déficientes visuelles et met également en difficulté bon nombre de personnes à mobilité réduite et âgées ». A ce jour, sa demande de rendez-vous est restée sans réponse.

    Une habitante angoissée

    Catherine, une habitante du quartier, malvoyante et malentendante, témoigne de son « presqu'accident du 21 novembre 2017 ». Surprise que sa télécommande de sonorisation ne fonctionne pas, elle s'engage sur le passage piéton sans savoir si un véhicule arrive. « Tout à coup, j'ai aperçu un phare de moto à un mètre de moi. Elle a freiné au dernier moment, avec son conducteur tout aussi perplexe et surpris que moi. J'ai alors crié et un passant est venu à mon secours. » Elle se dit « angoissée » à l'idée de devoir traverser les carrefours de ce quartier dont huit feux ont été désactivés du jour au lendemain sans que la population n'en soit prévenue.

    Point de vue contraire

    Catherine s'indigne que cette « politique de guerre à la voiture » se fasse « au détriment des personnes vulnérables », notamment les enfants à qui on a appris à traverser lorsque le bonhomme passe au vert, les personnes en situation de handicap ou âgées... Selon elle, elles sont « à la merci de chauffards ou conducteurs n'observant pas le code de la route comme il en existe beaucoup à Paris ». Elle réfute ainsi le point de vue de Nathalie, habitante du quartier depuis 20 ans, également non-voyante, qui, elle, « trouve cette initiative très intéressante » et remarque « que les automobilistes sont beaucoup plus respectueux depuis qu'il n'y a pas les feux, regardant beaucoup mieux autour d'eux ! ». L'exception qui confirme la règle ?

    Ailleurs en France

    Paris n'est pas la seule à mener cette politique où, contre toute attente, les feux de signalisation seraient le mauvais allié de la sécurité routière. Plusieurs métropoles françaises, comme Nantes ou Bordeaux, ont décidé de se passer de leurs feux en cœur de ville. Rouen fait, elle aussi, face à un véritable « casse-tête ». Même si l'effet sur le flux automobile semble indéniable, ce nouveau système handicape plus encore les piétons déficients visuels. Sans compter que certaines voitures électriques sont désormais particulièrement silencieuses (article en lien ci-dessous)… « C'est terrible pour nous. Il y a trop de circulation et, quand on ne voit pas, il est difficile de se faufiler entre les voitures comme le ferait un piéton voyant », explique Dominique Lecanu, membre de l'association Valentin Haüy dans les colonnes de Paris Normandie.fr.L'intensité du trafic sur le carrefour perturbe aussi son chien « qui ne sait traverser que bien en ligne ». Depuis, les chauffeurs du tramway qui circule dans la zone expérimentale ont reçu la consigne de faire sonner leur « gong » quand ils identifient sur le trottoir une personne avec une canne ou un chien guide. Mais toutes n'en sont pas équipées !

    La loi du plus fort ?

    La solution alternative serait de remplacer la majorité des feux de signalisation par des carrefours giratoires ; option peu envisageable dans les villes par manque d'espace. « Dans les métropoles, les feux de signalisation restent particulièrement indispensables car ils sont associés à la sécurité des transports en commun (bus ou tramways),explique Aly Adham, président du Syndicat des équipements de la route, dans Les EchosLeur suppression ne tient que dans un monde idéal et encore lointain où chacun se conformerait au code de la route et au respect des règles de civisme. » Pour toute une catégorie d'usagers, ce serait donc faire régner la loi du plus fort et donner la priorité à ceux qui se sentent le moins en danger ?

    https://informations.handicap.fr/art-feux-tricolores-suppression-853-10445.php

     

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